D’un parcours étoilé à la pédagogie culinaire, Chef Briffard se confie
Eric Briffard, chef étoilé se confie sur sa carrière, ses premiers pas en cuisine ou encore son plus beau souvenir : son titre de Meilleur Ouvrier de France
Apprenez à analyser un plat selon le Chef Éric Briffard, Meilleur Ouvrier de France, Chef Exécutif, Directeur des Arts Culinaires à l’institut Le Cordon Bleu Paris.
Analyser un plat c’est tout d’abord faire appel à l’ensemble de nos sens : la vue, l’odorat, l’ouïe, le toucher et le goût. C’est aussi l’identifier et l’évaluer par la dégustation. L’analyse d’un plat consiste donc à émettre un jugement sensoriel. C’est être capable de décrire les saveurs de ce que l’on déguste, juger la qualité des produits pour ensuite mieux classer ses impressions gustatives. Plus on a d’expérience d’analyse et plus le jugement sera fiable. L’analyse doit être réalisée dans de bonnes conditions : un lieu aéré, calme et éclairé, et la personne qui s’apprête à goûter devra éviter de fumer ou de porter un parfum trop fort pour ne pas déranger ses sens.
Pour laisser un souvenir inoubliable, un plat doit surprendre le consommateur, créer en lui une émotion, soit en attisant sa curiosité, soit en stimulant ses sens par la composition de ses accords de goût. La composition d’un plat, son alchimie, sa partition des 5 saveurs (acide, salé, amer, sucré, umami), peuvent susciter la gourmandise, l’émotion ou un souvenir d’enfance. La vraie émotion sans influence est rare mais inoubliable. L’umami est le dernier né des cinq goûts fondamentaux. Jusque dans les années 1980, seuls quatre goûts étaient répertoriés : le sucré, le salé, l’acide et l’amer. Connu également sous le nom de glutamate, l’umami stimule directement notre langue.
La première approche d’un plat se fait par le visuel.
Le plat doit être harmonieux, équilibré, il doit retenir l’attention de l’œil par ses couleurs, sa forme, sa présentation ou son originalité. Il doit susciter la curiosité et l’envie, quel que soit la technique ou le mode culinaire (classique, revisité ou évolutif).
Après les impressions visuelles, c’est l’odorat qui doit être mis en éveil par les senteurs et les flaveurs du plat. C’est l’olfactif qui communique les arômes d’un plat ou l’esprit d’un vin. L'odorat est un sens qui fonctionne par association.
J’ai l’habitude, avant de clocher un plat d’agneau, d’ajouter quelques touches de romarin séché et fumant. Certains utilisent un spray ou une huile essentielle pour créer une ambiance et conditionner le consommateur, avant même qu’il ait goûté le plat.
Pour continuer notre chemin des sens, nous arrivons à l’ouïe. En effet, le bruit provoqué par un plat éveille la curiosité et l’appétit : le croustillant sous la fourchette d’un millefeuille ou le crépitant d’une volaille rôtie dans son plat de cuisson par exemple.
La texture en bouche révèle et accentue la dégustation d’un plat. La diversité de texture permettra d’apprécier différemment le plat (mou, dur, moelleux, craquant, croustillant), mais aussi sa consistance (grasse, sèche, humide) ainsi que sa température (chaude, froide, tiède, glacée ou brûlante).
Le consommateur va ensuite goûter le plat avec le palais, les papilles et la langue. Cela va révéler la texture, la complexité des saveurs ainsi que leurs alchimies.
Plusieurs critères définiront un jugement sur le goût comme la température du plat, les textures, les assaisonnements, les saveurs d’amertume, d’acidité, de douceur ou d’iode qui révèlent l’équilibre des accords d’un plat, son harmonie.
Même si l’ensemble des sens interviennent dans l’analyse d’un plat, le plus fort reste avant tout le goût.
Afin de savoir si un plat est harmonieux, il faut prendre un peu de chaque composant et en faire une seule bouchée. C’est ainsi que l’on peut identifier l’équilibre et l’harmonie des accords.
Il faut que tous les éléments du plat se répondent et se confondent afin de donner un goût agréable, gourmand et équilibré en bouche.
D’autres critères plus ou moins subjectifs vont également entrer en ligne de compte dans l’analyse d’un plat : comme, par exemple, son appellation qui doit susciter l’envie, le désir de gourmandise tout en respectant les éléments qui le composent. Le plat était-il aussi bon qu’imaginé avant de le manger ? Il faut aussi prendre en considération l’éthique et l’origine du consommateur avant de réaliser un plat car chaque culture a ses codes.
Un grand plat doit faire ressentir un réel plaisir à celui qui le consomme : une émotion ! Il laissera un souvenir impérissable, une évocation exceptionnelle, marquante. Ce sera un plat dont on se souviendra comme un plat signature.
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